
Livre : Gestion de classes et d'élèves difficiles (Jean-Claude Richoz) |
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Pédagogie Explicite - Livres |
Écrit par Françoise Appy |
Dimanche, 01 Août 2010 00:00 |
Jean-Claude RICHOZ : Professeur formateur à la HEP Vaud, il partage ici l'expérience accumulée pendant plus de trente ans en tant qu'enseignant secondaire, puis chargé de cours et lecteur à l'Université et enfin formateur d'enseignants dans différentes institutions. Observateur attentif des pratiques d'enseignement, il est avant tout engagé sur le terrain dans la formation continue des enseignants.
Résumé :
Commentaire : Voici un livre qui devrait figurer en bonne place dans la bibliothèque d’un enseignant débutant. Un livre qui parle vrai, ce qui ne l’empêche pas d’être un véritable outil pour tous, jeunes et moins jeunes. Jean-Claude Richoz réussit l’exploit de faire une description très juste des classes difficiles, du vécu profond et réel des enseignants, celui dont on n’aime pas se vanter. Suit une analyse argumentée et convaincante, de laquelle émergent des solutions pédagogiques tout aussi pragmatiques, ayant fait l’objet d’expérimentations dans les classes. Le tout assorti de nombreux témoignages d’enseignants. Il était hardi de s’attaquer à un tel sujet et d’exprimer un certain nombre d’idées qui, si elles sont justes, n’en sont pas moins osées dans la bien pensance pédagogique. Mais il est vrai que les années 70 s’éloignent de plus en plus, et les langues commencent à se délier. Les enseignants pourraient vous dire : « Enfin un livre qui ne nous culpabilise pas et qui nous donne des outils efficaces, et les moyens d’en comprendre l’utilisation ». Car rien n’est pire qu’une accumulation de recettes quand on n’en comprend ni les tenants ni les aboutissants. Ce livre n’est pas un livre de recettes. Il est bien plus. La description des classes difficiles a été faite en Suisse (cantons de Berne et Vaud) mais on y retrouve les mêmes profils que chez nous. Une classe est difficile quand un enseignant est empêché d’exercer correctement son métier et que la majorité des élèves ne peut plus se concentrer et travailler dans le calme, à cause de perturbations diverses, plus ou moins intenses et plus ou moins durables. Bruit, agitation, agressivité, opposition, indiscipline chronique, passivité ou anorexie scolaires en sont les symptômes et tiennent plus souvent d’un climat général que de véritables transgressions. J.C. Richoz analyse le phénomène par l’évolution de la société et la crise des valeurs, les difficultés familiales, les déficiences éducatives, mais aussi des méthodes et programmes d’enseignement inadaptés. Il souligne le rôle capital des déficiences éducatives précoces, de plus en plus nombreuses et n’hésite pas à évoquer la relation de cause à effet entre le laxisme parental durant la petite enfance et les problèmes comportementaux des élèves. Il s’appuie pour cela sur des études spécifiques. Je retiens aussi tout particulièrement l’influence de certaines méthodes pédagogiques propres à accentuer ces problèmes de comportement ; comme par exemple les démarches inductives qui « donnent lieu à des débordements d’indiscipline de la part d’élèves qui se sentent désécurisés » et qui provoquent une baisse de l’estime de soi. « Très souvent par exemple, la pédagogie active est devenue de l’activisme » contribuant ainsi à déstructurer l’enseignement. J.C. Richoz fait un lien très intéressant avec les démarches de découverte et le frein que cela constitue à l’autonomie des élèves, dont certains développent une forme de dépendance à l’enseignant, ne travaillant que lorsqu’il est à côté de lui. Selon lui, la pratique didactique qu’il appelle la “fichite” (généralisation du travail sur fiches photocopiées) a également contribué à détruire l’envie d’apprendre et à provoquer le dépérissement de l’enseignement. Mais la gestion de classe porte elle aussi une large responsabilité avec la question des règles de classe et de leur observation ; celle-ci doit s’accompagner de sanctions. Mais les enseignants s’interdisent souvent de sanctionner, confondant sanction et punition, redoutant de passer pour autoritaires. Bien souvent les problèmes de comportement apparaissent dans des classes desquelles les règles sont absentes ou mal définies, ou non accompagnées de sanctions qui en permettent le respect. J.C. Richoz connaît bien les enseignants et aborde la crise de confiance qu’ils traversent aujourd’hui, crise d’autorité et d’identité professionnelle. Des enseignants n’osant plus adopter des positions d’autorité, doutant d’eux-mêmes, ayant perdu leurs repères, ne sachant plus ce qui est bon, ce qui ne l’est pas, subissant la triple pression des élèves, de leurs parents et de leur hiérarchie. Les diverses réformes des années passées en portent, selon lui, une grande part de responsabilité : « ils ont mis de côté leur propre jugement sur le bien-fondé de leur action pour les remplacer par divers courants de pensée à la mode » (p 111). Il évoque ainsi le phénomène du burn-out enseignant, pourtant tabou, tout au moins ici en France. Une enquête a été menée sur la question dans la ville de Bâle ; elle a montré qu’un tiers d’entre eux révèlent un symptôme d’épuisement professionnel. Le chapitre IV fait une nécessaire mise au point sur la question de l’autorité, ses diverses formes ainsi que sur la théorie, curieusement moins connue, du développement moral chez Piaget. Le tout en rapport bien sûr avec l’apprentissage des règles par l’enfant. Suit enfin la partie “pratique” ou comment s’y prendre pour remédier à une situation déjà installée ou pour éviter qu’elle n’apparaisse. Les procédures pour mettre en place des règles (par l’adulte) et les moyens pour les faire respecter. Au passage, il démonte quelques poncifs, notamment celui qui consiste à faire construire les règles par les élèves eux-mêmes en s’imaginant qu’ainsi ils les respecteront mieux. « Il n’est même pas opportun de le leur laisser penser, car on leur donne l’illusion de participer à une procédure qui ne leur appartient pas. Ils se mettent à croire que, si on leur demande de participer à l’élaboration des règles, c’est qu’elles sont discutables. (…) On ne demande pas à un candidat d’inventer les règles de la circulation routière quand il s’inscrit pour obtenir son permis de conduire… » (p 210). Quelques principes de base relatifs à l’enseignement primaire :
Les démarches de recadrage doivent être faites par un travail d’équipe au sein des écoles pour plus d’efficacité. Malheureusement chez nous, l’individualisme pédagogique dans les écoles est un fait et même pour des sujets aussi importants que la discipline générale, il est très difficile de former une véritable équipe. Je suis pourtant persuadée que c’est une démarche indispensable pour le regain d’autorité des enseignants. Cette étape est émaillée de témoignages d’enseignants et sont aussi analysées les causes des difficultés de recadrage. Les sanctions font l’objet d’un chapitre entier. Il existe une différence entre sanction et punition, mais en Primaire il est préférable d’utiliser le terme punition, car la notion de sanction n’est pas compréhensible par les élèves. L’enseignant gardera en tête la fonction éducative de la punition qui doit être nécessaire, respectueuses, juste, individuelle, exceptionnelle, réparatrice, porteuse de sens et bienveillante. Enfin J.C. Richoz évoque la présence en classe, thème difficile et généralement peu abordé. Des années de “centration sur l’élève” ont conduit les enseignants à renoncer à enseigner, à transmettre, à témoigner de leur passion. Y sont évoqués tour à tour, la conscience de la classe, la réactivité, le langage non verbal, le timbre de la voix, le regard, l’art de la parole et du silence, la gestuelle, l’occupation de l’espace : autant de thèmes qui, s’ils sont explicitement présentés, peuvent contribuer à l’amélioration de la pratique du métier. Le sujet choisi par J.C. Richoz et la façon dont il est traité contribuent à la professionnalisation du métier d’enseignant dans la mesure où sont décrites et présentées explicitement les attitudes qu’il convient de privilégier pour une bonne gestion de la classe et des élèves en difficultés en particulier. Après des années d’omerta sur ce qui fait la bonne gestion d’une classe, il était grand temps de dire les choses et d’observer les comportements efficaces afin d’en tirer un enseignement. _________________________
Jean-Claude RICHOZ : Après avoir enseigné quelques années au degré secondaire puis à l'Université de Fribourg comme lecteur en didactique, Jean-Claude Richoz est devenu professeur formateur à la Haute école pédagogique du canton de Vaud. Spécialiste de terrain, il partage dans cet ouvrage l'expérience accumulée durant plus de quarante ans dans la formation continue des enseignants primaires et secondaires. Résumé :
Préface : Cet ouvrage est une version nouvelle, entièrement refondue et actualisée, de Gestion de classes et d'élèves difficiles, publié en 2009. Quand j'ai appris que la cinquième édition était bientôt épuisée, j'ai assez rapidement écarté l'idée de sortir une sixième édition de ce livre écrit il y a déjà dix ans. Mais je ne pouvais pas non plus me résoudre à en rester là, vu les innombrables messages d'enseignants reçus durant toutes ces années me disant que ce livre les a beaucoup aidés à rétablir un cadre de travail dans leur classe, et même qu'il a « sauvé la vie » de certains. J'ai donc décidé de me remettre à l'ouvrage et d'en réécrire une version nouvelle, plus condensée et essentiellement pratique. Ce nouveau livre est destiné en priorité aux enseignants sur le terrain. Pour qu'il soit moins long que le précédent, j'ai supprimé les références et aspects théoriques superflus et limité le nombre d'exemples. Pour la clarté de la présentation écrite, j'ai choisi de consacrer un chapitre à chacun des aspects essentiels. Il faut toutefois garder à l'esprit qu'il est nécessaire de mener plusieurs démarches en parallèle pour réussir à résoudre des difficultés dans une classe. Chaque chapitre étant rédigé comme un tout abordable isolément, le lecteur a la possibilité de suivre le parcours proposé ou de commencer sa lecture là où bon lui semble. Pour marquer la rupture par rapport au livre de 2009, l'ouvrage porte un nouveau titre, qui est celui des cours que j'ai donnés un peu partout en Suisse romande ces dernières années et qui m'occupent encore partiellement. Son contenu doit beaucoup à la collaboration avec les enseignants ayant participé à ces cours et que j'ai accompagnés dans le recadrage de leurs classes. Je les en remercie sincèrement. Son but est de faire connaître à d'autres collègues les démarches et moyens pratiques que nous avons mis au point et qui peuvent les aider à résoudre des difficultés semblables. L'expérience que nous avons acquise ensemble montre que si une équipe d'enseignants convaincue et déterminée met en œuvre les outils et les conseils présentés dans cet ouvrage, elle peut parvenir en un ou deux mois à rétablir un bon climat de travail dans une classe qui dysfonctionne, aussi bien au niveau du collège secondaire que du gymnase. Si une enseignante d'une classe primaire entreprend avec la même détermination de recadrer des enfants perturbateurs, elle peut également arriver, même si elle est toute seule, à les faire changer de comportement et cesser d'entraver son travail. Quelques exemples de ces réussites sont présentés dans les chapitres 7 et 8 de l'ouvrage. Depuis 2009, j'observe que la situation sur le front de l'indiscipline dans les écoles ne s'est globalement pas améliorée, mais malheureusement encore aggravée. Face à cette dégradation des conditions d'enseignement, j'encourage plus que jamais les enseignants à réagir avant que le phénomène ne prenne encore plus d'ampleur. J'estime qu'il faut en particulier lutter contre l'indiscipline dans les classes enfantines et primaires, car l'action y est encore facile à mener et constitue la meilleure prévention pour éviter une aggravation des situations au degré secondaire. Quand les enseignants s'entraident et collaborent étroitement avec la direction pour recadrer une classe ou des élèves, les situations redeviennent normales dans la très grande majorité des cas. La réussite n'est pas toujours assurée, mais elle se trouve la plupart du temps au rendez-vous. Elle est avant tout une question de conviction, de détermination et finalement de courage à s'affirmer et à s'imposer devant les élèves. Elle nécessite un peu d'entraînement pour parvenir à bien poser le cadre de travail, à mener des recadrages, à développer une plus grande présence et maîtrise de soi, à soigner la relation affective avec les élèves. Mais ce sont des compétences qui s'acquièrent vite. J'espère que ce nouvel ouvrage encouragera et aidera toutes celles et tous ceux qui sont confrontés à des difficultés à les résoudre et qu'ils retrouveront ainsi l'envie et la passion d'enseigner.
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